Le Trompeur trompé
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Il était une fois un homme nommé Simon, très riche mais aussi avare et radin qu’il pouvait l’être. Il avait une gouvernante appelée Nina, une femme intelligente et compétente, et comme elle faisait son travail soigneusement et consciencieusement, son maître la respectait beaucoup.
Dans sa jeunesse, Simon avait été l’un des jeunes les plus gais et actifs du voisinage, mais en vieillissant, il avait de plus en plus de mal à marcher. Sa fidèle servante l’encouragea à acheter un cheval pour épargner ses vieux os. Finalement, Simon céda à la demande et à l’éloquence persuasive de sa gouvernante et se rendit un jour au marché où il avait vu une mule qu’il pensa être idéale pour lui, et qu’il acheta pour sept pièces d’or.
Or, il se trouvait au marché trois joyeux gredins qui préféraient vivre des biens d’autrui plutôt que travailler pour leur propre compte. Dès qu’ils virent que Simon avait acheté une mule, l’un d’eux dit à ses deux comparses : « Mes amis, cette mule doit être à nous d’ici peu. »
« Mais comment allons-nous faire ? » demanda l’un d’eux.
« Nous devons tous trois nous poster à différents intervalles sur le chemin de retour du vieillard, et à tour de rôle déclarer que la mule qu’il a achetée est un âne. Si nous nous y tenons, vous verrez, la mule sera bientôt à nous. » Cette proposition satisfit pleinement les autres et ils se séparèrent selon leur plan.
Lorsque Simon passa, le premier filou l’aborda : « Que Dieu vous bénisse, mon bon monsieur. »
« Merci pour votre courtoisie, » répondit Simon.
« Où êtes-vous allé ? » demanda le voleur.
« Au marché, » fut la réponse.
« Et qu’avez-vous acheté là-bas ? » continua le filou.
« Cette mule. »
« Quelle mule ? »
« Celle sur laquelle je suis assis, bien sûr, » répliqua Simon.
« Êtes-vous sérieux ou plaisantez-vous ? »
« Que voulez-vous dire ? »
« Parce qu’il me semble que vous avez un âne, et non une mule. »
« Un âne ? Quelle absurdité ! » cria Simon, et sans un mot de plus, il poursuivit son chemin. Après quelques centaines de mètres, il rencontra le deuxième complice, qui l’interpella : « Bonjour, cher monsieur, d’où venez-vous ? »
« Du marché, » répondit Simon.
« Les choses étaient-elles bon marché ? » demanda l’autre.
« Je le pense bien, » dit Simon.
« Avez-vous fait une bonne affaire ? »
« J’ai acheté cette mule sur laquelle vous me voyez. »
« Est-il possible que vous ayez réellement acheté cet animal pour une mule ? »
« Bien sûr. »
« Mais, bon Dieu, ce n’est rien d’autre qu’un âne ! »
« Un âne ! » répéta Simon, « si une autre personne me dit cela, je lui fais cadeau de cet animal misérable. »
Sur ces mots, il continua son chemin et rencontra très vite le troisième filou, qui lui dit : « Que Dieu vous bénisse, monsieur ; venez-vous du marché par hasard ? »
« Oui, » répliqua Simon.
« Et quelle affaire avez-vous conclue là-bas ? » demanda le coquin.
« J’ai acheté cette mule sur laquelle je suis monté. »
« Une mule ! Êtes-vous sérieux ou voulez-vous vous moquer de moi ? »
« Je parle tout à fait sérieusement, » dit Simon ; « il ne me viendrait pas à l’esprit de plaisanter sur cela. »
« Oh, mon pauvre ami, » s’exclama l’escroc, « ne voyez-vous pas que c’est un âne et non une mule ? Vous avez été dupé par quelques misérables escrocs. »
« Vous êtes la troisième personne en deux heures à me dire la même chose, » répondit Simon, « mais je ne pouvais pas le croire, » et en descendant de la mule, il déclara : « Gardez l’animal, je vous en fais cadeau. »
Le filou prit la bête, le remercia gentiment et s’en alla rejoindre ses camarades, tandis que Simon continua son chemin à pied.
Dés que le vieil homme rentra chez lui, il raconta à sa gouvernante qu’il avait acheté une bête pensant que c’était une mule, mais qu’il s’était avéré que c’était un âne, du moins, c’était ce que lui avaient assuré plusieurs personnes qu’il avait rencontrées en chemin, et de dégoût, il avait fini par la donner.
« Oh, simple d’esprit ! » s’écria Nina ; « ne voyiez-vous pas qu’ils vous jouaient un tour ? Je pensais que vous aviez plus de jugeote que cela ; ils ne m’auraient pas eue de cette manière. »
« Ça ne fait rien, » répondit Simon, « je vais leur en jouer une bien meilleure ; car soyez assuré qu’ils ne se contenteront pas de m’avoir pris l’âne, mais qu’ils essaieront de trouver une nouvelle ruse pour obtenir quelque chose de plus, soyez-en assurée. »
Il y avait, dans le village, non loin de la maison de Simon, un paysan qui possédait deux chèvres. Elles étaient si semblables en tous points qu’il était impossible de les distinguer l’une de l’autre. Simon les acheta toutes les deux, les paya au plus bas prix possible, et les conduisit chez lui. Il dit à Nina de préparer un bon repas, car il comptait inviter des amis à dîner. Il lui demanda de rôtir du veau, de faire cuire une paire de poulets, et lui donna des herbes pour préparer un plat savoureux. Il lui demanda également de réaliser la meilleure tarte qu’elle puisse faire. Ensuite, il prit l’une des chèvres, l’attacha à un poteau dans la cour et lui donna de l’herbe à grignoter. Quant à l’autre chèvre, il lui passa une corde autour du cou et l’emmena au marché.
À peine arrivé, les trois hommes qui avaient gagné sa mule aperçurent Simon, et s’approchant de lui, demandèrent : « Bienvenue, Monsieur Simon, qu’est-ce qui vous amène ici ; êtes-vous en quête d’une affaire ? »
« Je suis venu acheter des provisions, » répondit-il, « car des amis viennent dîner chez moi aujourd’hui, et cela me ferait grand plaisir si vous honoriez aussi ma table de votre présence. »
Les complices acceptèrent volontiers cette invitation ; et après que Simon eut fait tous ses achats, il les attacha sur le dos de la chèvre et lui dit, en présence des trois escrocs : « Rentre à la maison maintenant, dis à Nina de rôtir le veau, de faire cuire les poulets, de préparer un plat savoureux avec des herbes, et de faire la meilleure tarte qu’elle puisse. As-tu bien compris ? Alors va, et que les bénédictions célestes soient avec toi. »
Dès qu’elle se sentit libre, la chèvre chargée trotta aussi vite qu’elle le put, et à ce jour, personne ne sait ce qu’il advint d’elle. Mais Simon, après avoir erré quelque peu sur le marché avec ses trois nouveaux « amis » et quelques autres qu’il avait rencontrés, retourna chez lui.
En entrant dans la cour avec ses invités, ils remarquèrent la chèvre attachée au poteau, ruminant tranquillement. Ils furent peu étonnés, car, bien entendu, ils pensaient qu’il s’agissait de la même chèvre que Simon avait envoyée à la maison avec des provisions. Dès qu’ils atteignirent la maison, Monsieur Simon demanda à sa gouvernante : « Eh bien, Nina, as-tu fait ce que je t’avais dit par l’intermédiaire de la chèvre ? » La rusée femme, qui comprit immédiatement son maître, répondit : « Bien sûr que oui. Le veau est rôti, et les poulets bouillis. »
« C’est parfait », dit Simon.
Quand les trois voleurs virent les viandes cuites et la tarte au four et entendirent les paroles de Nina, ils furent presque hors d’eux de stupéfaction et commencèrent à consulter immédiatement comment s’assurer que la chèvre soit à eux. À la fin du repas, ayant cherché en vain une ruse pour enlever la chèvre à Monsieur Simon, l’un d’eux dit : « Cher hôte, il faut absolument que vous nous vendiez votre chèvre. »
Simon répondit qu’il était très réticent à se séparer de l’animal, car aucune somme d’argent ne pourrait compenser sa perte ; néanmoins, s’ils y tenaient absolument, il leur laissait la chèvre pour cinquante pièces d’or.
Les filous, convaincus de faire une excellente affaire, payèrent immédiatement les cinquante pièces d’or, et quittèrent la maison assez joyeux, emmenant la chèvre avec eux. Une fois chez eux, ils dirent à leurs épouses : « Vous n’avez pas besoin de commencer à préparer le dîner demain jusqu’à ce que nous envoyions les provisions. »
Le lendemain, ils se rendirent au marché et achetèrent des poulets et d’autres provisions, et après les avoir attachées sur le dos de la chèvre (qu’ils avaient amenée avec eux), ils lui dirent tous les plats qu’ils souhaitaient que leurs épouses préparent. Dès que la chèvre se sentit libre, elle s’enfuit aussi vite qu’elle le put, et très vite se perdit de vue, et, pour autant que je sache, ne fut jamais revue.
À l’heure du repas, les trois rentrèrent chez eux et demandèrent à leurs femmes si la chèvre était revenue avec les provisions nécessaires, et leur avait dit ce qu’elles devaient préparer pour le repas.
« Oh, vous imbéciles ! » crièrent leurs épouses, « Comment avez-vous pu croire un seul instant qu’une chèvre ferait le travail d’une servante ? Vous vous êtes bien fait avoir pour une fois. Bien sûr, si vous abusez toujours des autres, votre tour de l’être est arrivé, et cette fois vous avez l’air bien bêtes. »
Quand les trois compères comprirent que Monsieur Simon les avait dupés et leur avait extorqué cinquante pièces d’or, ils entrèrent dans une telle colère qu’ils décidèrent de le tuer, et, saisissant leurs armes dans ce but, ils se rendirent chez lui.
Mais le vieux rusé, qui craignait pour sa vie que les trois voleurs ne lui fassent du mal, s’était mis sur ses gardes, et il dit à sa gouvernante : « Nina, prends cette vessie remplie de sang et cache-la sous ton manteau ; puis, quand ces voleurs viendront, je ferai mine de te blâmer et feindrai d’être si furieux que je te foncerai dessus avec mon couteau et percerai la vessie ; tu devras alors tomber à terre comme si tu étais morte, et laisse-moi m’occuper de la suite. »
À peine Simon avait-il dit ces mots que les trois gredins apparurent et se jetèrent sur lui pour le tuer.
« Mes amis, » appela Simon, « que me reprochez-vous ? Je n’y suis pour rien ; peut-être que ma gouvernante vous a causé quelque tort dont j’ignore tout. » Et sur ces mots, il se tourna vers Nina avec son couteau et le lui enfonça, transperçant la vessie remplie de sang. Aussitôt, la gouvernante tomba au sol comme morte, et le sang se répandit sur le sol.
Simon feignit alors d’être empli de remords à la vue de cette catastrophe effroyable, et cria d’une voix forte : « Malheureux que je suis ! Qu’ai-je fait ? Comme un fou j’ai tué la femme qui est le soutien de ma vieillesse. Comment pourrais-je continuer à vivre sans elle ? » Puis il saisit une flûte et lorsque qu’il en sonna pendant un certain temps, Nina se releva vivante et bien portante.
Les filous étaient plus stupéfaits que jamais ; ils oublièrent leur colère, et après avoir acheté la flûte pour deux cents pièces d’or, ils rentrèrent chez eux joyeusement.
Peu de temps après, l’un d’eux se disputa avec sa femme, et dans sa colère, il planta son couteau dans sa poitrine, la faisant tomber morte au sol. Puis il prit la flûte de Simon et en joua de toutes ses forces, espérant ramener sa femme à la vie. Mais il souffla en vain, car la pauvre âme était aussi morte qu’une pierre tombale.
Quand un de ses camarades entendit ce qui s’était passé, il dit : « Imbécile, tu n’as pas dû le faire correctement ; laisse-moi essayer, » et sur ces mots, il saisit sa femme par les cheveux, lui trancha la gorge avec un rasoir, puis prit la flûte et souffla dedans de toutes ses forces mais ne put la faire revenir à la vie. La même chose arriva au troisième filou, si bien qu’ils se retrouvèrent tous les trois sans épouse.
Plein de colère, ils coururent chez Simon, et refusant d’écouter un mot d’explication ou d’excuse, ils saisirent le vieil homme et le mirent dans un sac, dans l’intention de le noyer dans la rivière voisine. Sur le chemin, cependant, un bruit soudain les fit paniquer et ils laissèrent tomber le sac contenant Simon et s’enfuirent pour sauver leurs vies.
Peu de temps après, un berger passa avec son troupeau, et tandis qu’il suivait lentement les moutons, qui s’arrêtèrent ici et là au bord du chemin pour brouter l’herbe tendre, il entendit une voix plaintive se lamenter : « Ils insistent pour que je la prenne, et je ne le veux pas, car je suis trop vieux et je ne peux vraiment pas l’avoir. » Le berger fut très surpris, car il ne pouvait comprendre d’où venaient ces mots, répétés plus d’une fois, et regarda autour de lui à droite et à gauche ; enfin, il aperçut le sac où Simon était caché, et en s’approchant, il l’ouvrit et découvrit Simon répétant sa triste plainte. Le berger lui demanda pourquoi il avait été laissé là attaché dans un sac.
Simon lui répondit que le roi du pays avait insisté pour lui donner une de ses filles en mariage, mais qu’il avait refusé cet honneur car il était trop vieux et trop faible. Le berger, simple d’esprit, crut son histoire aveuglément et lui demanda : « Pensez-vous que le roi du pays me donnerait sa fille ? »
« Oui, certainement, je sais qu’il le ferait, » répondit Simon, « si vous étiez attaché dans ce sac à ma place. » Puis sortant du sac, il y installa le berger confiant à sa place, et à sa demande le ferma solidement et reprit le troupeau lui-même.
À peine une heure plus tard, les trois filous revinrent à l’endroit où ils avaient laissé Simon dans le sac, et sans l’ouvrir, l’un d’eux le saisit et le jeta à la rivière. Et ainsi le pauvre berger se noya à la place de Monsieur Simon !
Les trois filous, ayant assouvi leur vengeance, retournèrent chez eux. Sur leur chemin, ils aperçurent un troupeau de moutons paissant non loin de la route. Ils eurent envie de voler quelques-uns des agneaux, et s’approchèrent du troupeau, et furent plus que surpris de reconnaître Monsieur Simon, qu’ils avaient noyé dans la rivière, en tant que berger qui gardait les moutons. Ils lui demandèrent comment il avait réussi à sortir de la rivière, à quoi il répondit :
« Allez-vous-en – vous n’êtes pas mieux que des ânes insensés ; si vous m’aviez noyé dans une eau plus profonde, je serais revenu avec trois fois plus de moutons. »
Quand les trois filous entendirent cela, ils lui dirent : « Oh, cher Monsieur Simon, faites-nous la faveur de nous attacher dans des sacs et de nous jeter dans la rivière pour que nous abandonnions nos mauvaises habitudes de vol et devenions propriétaires de troupeaux. »
« Je suis prêt, » répondit Simon, « à faire ce que vous souhaitez ; je ne refuserais rien au monde pour vous. »
Il prit alors trois sacs solides et y mit chacun des hommes, les attacha si étroitement qu’ils ne pouvaient pas en sortir, puis les jeta tous à la rivière ; et ce fut la fin des trois filous. Mais Monsieur Simon retourna chez sa fidèle Nina, riche en troupeaux et en or, et vécut de nombreuses années dans la santé et le bonheur.
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